Lettre d´info n°5 - Suite

Et la prévention dans tout cela (suite)

Dans cette loi, nous échappons au débat sur la castration physique que la Garde des Sceaux avait évoquée. Le parlement ne débattra pas (pas encore mais jusqu’à quel nouveau fait divers endeuillant l’histoire des Hommes) de la manière dont les génitoires devraient être coupées. Soulagement donc de voir que la barbarie n’avance qu’à petit pas, c’est bien la seule bonne nouvelle que ne contient pas cette loi.

Quelle prévention peut-on donc espérer pour un tel sujet ? Pourquoi réduire la prévention à celle de la récidive ? La première chose est de réaffirmer que l’idéologie sécuritaire ne fait que renforcer la stigmatisation de ces auteurs de violences et de les isoler dans leurs actes en les posant du côté de l’inamendable, du dangereux à jamais. Certes, nous savons tous que la dangerosité est un facteur avec lequel, en psychiatrie, nous travaillons tous et qui constitue la notion de risque. Vivre est risqué faut-il le répéter. Cette idéologie sécuritaire en fait des étrangers radicaux dont nul ne peut rien attendre et donc qu’il faut retrancher du camp des hommes. Comment pouvoir réhabiliter identitairement ceux qui sont exclus de cette manière ? Ceux que nous préférons regarder comme des hapax de notre civilisation, ceux qui portent pour nous cette violence qui tous nous habitent mais que nos conditions historiques de développement éducatif individuel familial nous fait croire que nous la maîtrisons. Que les conditions changent et la donne peut s’en trouver largement modifiée. Du reste en préséance d’une mise en situation de violences sexuelles pour un sujet on enregistre régulièrement une modification précisément de ces conditions.

Chacun l’aura compris, il est d’abord question de regard. Comment pouvoir continuer de regarder ces auteurs comme des hommes et des femmes que l’on peut encore qualifier de « prochain ». Peut-être est-ce là, la première des préventions. Une politique de prévention n’est-elle pas d’abord celle capable de réinscrire ces sujets différemment dans notre regard, en renforçant l’idée qu’aucune personne ne peut être réduite à son acte, fut il une maltraitance sexuelle agie ? Tout acte, quel qu’il soit, présente une histoire et est donc vecteur d’un sens. Encore faut-il que quelqu’un se place en position d’en être le récipiendaire. Toute politique trop sécuritaire gomme cette dimension et entraîne dans une spirale répressive et parallèlement  une loi qui enjoint trop le soin, transforme le soin en auxiliariat de justice à la solde du sécuritaire et détruit la notion de soin dans laquelle tout sujet doit rencontrer la dimension de confiance. Soigner, c’est certes « prendre soins de » mais aussi pour prendre soins de , il faut aussi pouvoir « faire confiance raisonnablement à ». Trop de soins signifie une disparition de cette confiance dans laquelle s’inscrit la notion de risque. Le soin présente toujours un risque. Un soin sans risque se nomme miracle. La prévention se doit de prendre en compte ces dimensions. Elle devra travailler avec ceux qui assurent notre « bon gouvernement ». In fine ce seront eux qui, au travers de leurs actions, pourront relayer la possibilité d’un regard différents, un regard qui identifie l’autre comme un autre moi-même potentiel, un semblable, un prochain. La première prévention serait d’arrêter de stigmatiser ces sujets dans le regard que le champ social, via les politiques relayé par les médias, portent sur eux sans nier les immenses délabrements, tant physiques que psychiques, que leurs actions infligent aux victimes. Cela pour dire qu’en cette matière précise, la violence sexuelle, il ne saurait y avoir de prévention qu’au niveau de notre culture même avec une forte dimension de réflexion éthique, où les politiques s’engagent autrement que sous l’unique bannière du tout  sécuritaire.

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