Lettre d´information n°3 - suite

Suite commentaire de l´ouvrage de Laurent Guyenot : Le livre noir de l’industrie rose : « de la pornographie à la criminalité sexuelle »

Nous vous proposons une note de lecture sur un livre paru en 2000  de Laurent Guyenot qui est un véritable réquisitoire contre la pornographie à une époque où elle ne prospérait pas encore autant qu’aujourd’hui sur le net. Toutefois il nous faut signaler que cette approche avant tout journalistique peut décevoir celui qui s’attendrait une démonstration surtout clinique du rapport entre la pornographie et la criminalité sexuelle comme le sous-titre pourrait le laisser entendre.

L’auteur évite de tomber dans une simplification qui consisterait à établir un rapport de cause et d’effet entre les deux phénomènes. Par contre, il démontre que la pornographie est un facteur très important parmi tous ceux qui concourent aux agressions sexuelles par sa fourniture d’un « substrat culturel » qui banalise et même valorise l’usage de la violence et de la domination dans les rapports sexuels. Un facteur aggravant : l’effet d’accoutumance et de dépendance qui entraine son utilisateur, au bout du compte éternellement frustré, à rechercher des stimulations toujours plus extrêmes, L’auteur rassemble beaucoup de données policières, sociologiques, psychologiques et médicales. Pour appuyer ses démonstrations il convoque des psychiatres et psychanalystes : Professeur Dubec, Dr Balier, Dr Salinger, Dr Coutanceaux, Dr Benezech, Dr Zagury, … 

On y constate que :
- des études américaines et françaises attestent que la majorité des auteurs de violences sexuelles incarcérés ont été de grands consommateurs de pornographie dès leur jeunesse
- qu’il y a une « évolution fulgurante » de la pornographie de 1970 à  2009 tant dans son contenu passant de la représentation de « simples femmes nues » à des scènes de viols y compris collectifs parfois accompagnés de sévices que dans la quantité, l’accessibilité et ce dans tous les pays occidentaux…  Dans les mêmes pays, la criminalité sexuelle décrit une courbe ascendante dans le même laps de temps. Nous devons nous garder d’effectuer une corrélation directe entre les deux phénomènes mais si nous croisons les propos du Dr Zagury et du Dr Balier, l’hypothèse du facteur favorisant de la pornohard dans les agressions sexuelles en sort renforcée :
« Le consommateur de pornohard est dans la position du voyeur pervers invité à jouir du spectacle de la souffrance de l’autre. Au fil des séances, le rôle de tortionnaire finit par lui coller à la peau » - Dr Zagury
« Si la consommation de pornographie, même intensive ne produit pas à elle toute seule un AVS, elle n’en constitue pas moins un facteur facilitateur en fournissant, à l’imaginaire du sujet en défaut de mentalisation « un contenu à son « scénario de viol » ». – Dr Balier

L’auteur consacre de nombreuses pages à décrire les effets déstructurants de la pornographie sur la jeunesse, sur la vie sexuelle dans les couples, sur le potentiel amoureux de nos contemporains, sur le rapport à l’autre réduit très souvent à un corps sexué par l’érotisation du regard..

Après la lecture de ce livre, la note apparaît suffisamment salée pour que les acteurs de la prévention des violences sexuelles ne minimisent pas les effets ravageurs d’une pornographie de plus en plus violente et sans limite.


Pierre-Yves EMERAUD, CRIAVS RA

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