Éditorial par Dr Philippe Vittini, Directeur de programme CRIAVS Rhône-Alpes

Responsable de la délégation de Grenoble

C’est à l’occasion de l’entrée en vigueur le 1er octobre de la loi dite Taubira, promulguée le 15 août 2014, que je voulais souligner quelques interrogations qui me sont apparues (et qui n’engagent que leur auteur comme c’est la règle).

Il n’est pas question pour le non professionnel du droit que je suis de commenter la portée de ce texte, en tout cas sur l’ensemble des mesures qu’elle contient. Toutefois, plusieurs points peuvent susciter quelques interrogations. Ainsi, désormais, comme pour la contrainte aux soins en psychiatrie depuis juillet 2011, le maintien au sein de la société est le principe qui s’applique et l’enfermement l’exception.
Nous sommes dans un changement de paradigme où l’efficience de la sanction pénale passe par l’individualisation de la peine, et la protection de la société ne relève plus prioritairement de l’incarcération. A ce titre, et avec une grande cohérence interne, cette loi emporte la suppression des « peines planchers » et leur caractère systématique voire automatique. Peines planchers qui jugent un fait plus qu’une personne.

Cette visée humaniste et réaliste de la sanction pénale, présuppose des exigences encore accrues dans la connaissance de la personnalité de l’auteur de l’infraction pénale, qui est en grande partie réalisée par les auxiliaires de justice - psychiatres, psychologues et enquêteurs de personnalité - mandatés par les magistrats (du siège ou du parquet). L’attente est donc forte envers ces professionnels pour que leur évaluation se situe au plus près de la « vérité » du sujet, tout en déniant l’éventualité d’une appréciation potentiellement erronée, car nécessairement subjective.

Cette subjectivité qui provient de la rencontre duelle, et qui participe du fondement de l’expertise, est pourtant ce qui est tant redouté par la justice elle-même. D’ailleurs, la tentation est grande pour nombre d’entre nous dans le monde de l’expertise judiciaire de s’en affranchir en utilisant certains outils d’évaluation. Que nous faut-il connaître de l’avenir ? Rien de moins que la prédiction de la dangerosité d’un sujet non pas dans l’ici et le maintenant, mais dans un futur le plus lointain possible, mais jamais défini. Comme le dit Patrick Mistretta¹  : « … lorsque le droit pénal fait renaître de ses cendres le vieux concept de sûreté, c’est encore au psychiatre qu’il est fait appel afin de sonder l’impossible, de cerner le divinatoire qu’est la dangerosité du délinquant pour anticiper des choix sanctionnateurs ».
Ce projet de prédiction est effectivement en soi déraisonnable et comme Icare nous risquons de nous laisser griser par le sentiment de toute puissance qui n’est pas de mise, et d’oublier notre condition humaine.

Loin de rejeter en bloc les attentes d’une justice plus efficiente, il nous semble que le principe est plus d’approcher la réalité d’un sujet qui doit rendre des comptes à la société dans laquelle il doit se réintégrer, en recherchant les facteurs de changement de son fonctionnement psychique au fur et à mesure de son cheminement (et au moment du soin lorsqu’il est nécessaire), quel que soit le référentiel, plutôt que d’affirmer de manière péremptoire pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie.

La Psychiatrie et la Justice, tout comme les professionnels qui les composent, sont donc amenés à construire ensemble pour connaître les attentes de chacun, mais également les limites des uns et des autres, autour du cadre construit par la Loi, autant pénale que symbolique.

C’est d’ailleurs autour de toutes ces problématiques que nous avons souhaité réfléchir lors de notre journée d’étude du 27 mars 2015 dont le thème est : Prévention de la récidive des violences sexuelles : Psychiatrie, justice et société face aux évaluations, où nous espérons vous voir nombreux.

1 Le schizophrène, le psychiatre et les démences du droit pénal. P. Mistretta – Droit pénal N°7-8, juillet 2014 N°150-2014

Prochains événements du CRIAVS Rhône-Alpes :

Rencontre cinématographique du CRIAVS Rhône-Alpes - Délégation de Grenoble :   Perfect Mothers d´Anne FONTAINE, 2013   Mardi 04 novembre 2014 au Méliès à 17h45   Débat organisé en partenariat avec le cinéma le Méliès (FOL38) : ces rencontres sont proposées autour de la projection d´un film amenant des éléments de débat clinique et d´échanges avec la salle.   Inscription, et Cycle 2014/2015 des rencontres cinématographiques

	Rencontre du CRIAVS Rhône-Alpes - Délégation de St Étienne   Intervention d´André CIAVALDINI, Docteur en psychopathologie clinique, Psychanalyste, Directeur de recherche associé, Grenoble   «L’évaluation, partie prenante des stratégies de soins avec les auteurs de violences sexuelles»   Vendredi 21 novembre 2014 de 14h à 16h30 - Salle de conférence A - Hôpital Nord   Détails Inscriptions
	Soirée du CRIAVS Rhône-Alpes - Délégation de Grenoble :   Intervention de Serge PORTELLI, magistrat & de Marine CHANEL, journaliste   "La vie après une peine pour infraction sexuelle"   Jeudi 27 novembre 2014 à 20h30 dans les locaux du CRIAVS à Grenoble   Entrée libre sur inscription uniquement. Détails et inscription en ligne

Journée d´étude régionale CRIAVS Rhône-Alpes : "Prévention de la récidive des violences sexuelles : Psychiatrie, justice et société face aux évaluations"

Vendredi 27 mars 2015 à Grenoble - Programme en cours d´élaboration

Autres événements sélectionnés en région Rhône-Alpes

* Le 13/11/2014 - Séminaire de psychopathologie de l´AGPSY : L´intervention en analyse

* Du 20/11/2014 au 21/11/2014 - IREPS Education Santé Isère : analyser l’efficacité des actions de promotion de la santé avec l’outil de "catégorisation des résultats" de projets

* Le 28/11/2014 - Journée d´étude Ain-Psy : A l´écoute des familles

* Le 11/12/2014 - Séminaire de psychopathologie de l´AGPSY : Le psychodrame en groupe d’adultes

Consulter l´agenda en ligne, événements nationaux et régionaux

Russel Banks. Lointain souvenir de la peau. Paris : Ed. Actes Sud, Collection Babel, 2012, 544 p.

Par Camille Routier, psychologue clinicienne CRIAVS Rhône-Alpes

Résumé : « A l’instar de ses pareils, hommes de tous âges et de toutes conditions que leur addiction au sexe a conduits devant les tribunaux puis relégués loin des « zones sensibles », le Kid, vingt et un ans, bracelet électronique à la cheville, vit sous le viaduc de Floride. Depuis toujours livré à lui-même, il n’a pour ami qu’un iguane, bizarre cadeau offert par une mère passablement nymphomane. Stigmatisé par une société devenue jusqu’à l’hystérie adepte du « surveiller et punir », ce jeune homme en rupture suscite l’intérêt d’un certain « Professeur », universitaire à la curiosité dévorante, sociologue atypique qui, dans le cadre de ses travaux sur les sans-abri, approche le Kid et le prend peu à peu sous son aile. Mais il apparaît bientôt que le génial Professeur pourrait être un fabuleux menteur, et un expert en identités multiples…

Par cette fiction magistrale, qui met en scène l’enfer de la « déviance » et le supplice de l’exclusion, Russel Banks stigmatise l’aveuglement de nos sociétés saturées d’images qui semblent vouloir faire disparaître, jusqu’à la pathologie, leur corps collectif dans le rayonnement des écrans de la nuit sexuelle. »

Au-delà d’une intrigue bien ficelée dont l’auteur parvient à tenir le lecteur en haleine jusqu’aux dernières pages de cette oeuvre romanesque, Lointain souvenir de la peau propose une immersion dans la chaleur moite de la baie de Calusa, dont les descriptions foisonnantes offrent un décor à l’image du cheminement introspectif du héros, le Kid, stimulé par l’étrangeté de sa rencontre avec le Professeur.

Le Kid est un jeune adulte souffrant d’une addiction aux vidéos pornographiques et à la masturbation qui a été condamné pour tentative de détournement de mineure, « rencontrée » sur un CyberChat. Après une période d’incarcération, le jeune homme s’adapte aux conditions de vie précaires auxquelles le confine son placement sous surveillance électronique. Le bracelet qu’il porte à la cheville semble matérialiser l’exclusion d’un lien social à laquelle il était comme dors et déjà contraint du fait de son histoire, de sa construction psychique et affective dans le lien à l’autre.

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Pour rester informé(e) de l´actualité concernant les violences sexuelles,  les thérapies et prises en charge des auteurs de violences sexuelles, justice, prévention des violences sexuelles et médias (hypersexualisation…), sociologie, criminologie, histoire... , abonnez-vous au bulletin hebdomadaire de la documentation

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* PANORAMA DE PRESSE :

La presse est classée par bouquets thématiques. En cliquant sur le thème qui vous intéresse, vous retrouverez l´ensemble des articles en ligne.

* PUBLICATION :

* Actes du colloque : Savoirs, politiques et pratiques de l´exécution des peines en France au XXe siècle (25 et 26 mars 2014)

(Source : Criminocorpus.revues.org) Voir le programme et accéder au texte intégral des interventions.

* DROIT :

- La réforme pénale entre en vigueur
La majorité des dispositions de la loi sont effectives à compter du 1er octobre 2014.

Adapter la peine à chaque délinquant, tout en pensant l’après condamnation, et prendre en compte la victime : tels sont les principes génériques de la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines, dite « réforme pénale ». Voici un rappel des principales dispositions de la loi qui entrent en vigueur ce 1er octobre. La suite ici

La circulaire est disponible sur demande au centre de documentation du CRIAVS Rhône-Alpes

- Proposition de loi n° 2283 - Consultation obligatoire pour les structures gérant l´accueil de mineurs du "système d´information relatif aux accueils de mineurs" (SIAM), listant les auteurs d´agressions sexuelles ou violentes (14/10/2014)

Ces documents sont disponibles gratuitement - sous condition d´inscription préalable - à l´ensemble des professionnels de la région Rhône-Alpes en consultation ou en prêt. Ils peuvent également être envoyés par la poste.

Le centre de documentation du CRIAVS Rhône-Alpes répond à vos demandes documentaires et d´ouvrages par email, téléphone ou directement sur place à Grenoble et à Lyon.

Accéder aux sommaires et aux résumés

GHELFI, Fabienne. Le droit de l´exécution des peines : Espoirs ou désillusions ? Paris (FRANCE) : L´Harmattan, 2014, 153 p. (Droit privé et sciences criminelles)

LOUIS, Édouard. En finir avec Eddy Bellegueule. Paris (FRANCE) : Seuil, 2014, 220 p.

La guerre invisible : révélations sur les violences sexuelles dans l´armée française. Paris (FRANCE) : Les arènes, 2014, 304 p.

HOCHMANN, Jacques. Une histoire de l´empathie : Connaissance d´autrui, souci du prochain. Paris (FRANCE) : Odile Jacob, 2012, 219 p.

ROMAN, Pascal. L´institution et la violence : Les professionnels du soin à l´épreuve des liens. Issy les Moulineaux (FRANCE) : Elsevier Masson, 2014, 170 p.

GALLI CARMINATI, Giuliana, MENDEZ, Alfonso. J´abuse ? : La personne avec retard mental et troubles psychiatriques face à l´abus. Genève (SUISSE) : Médecine et Hygiène, 2006, 220 p.

GIULIANI, Fabienne. Les liaisons interdites : Histoire de l´inceste au XIXe Siècle. Paris (75005, FRANCE) : Publications de la Sorbonne, 2014, 477 p.

WILLIATTE-PELLITTERI, Lina. La médecine à l´épreuve du risque pénal. Paris (FRANCE) : L´Harmattan, 2014. (Droit, société et risque)

N°183 - Septembre/Octobre 2014 - Attaques du corps : diversité des mises en scène (Bulletin de Le Carnet Psy, N°183 [10/09/2014])

BLATIER, Catherine. Les personnalités criminelles : Évaluation et prévention. Paris (FRANCE) : Dunod, 2014, 222 p. (Psycho Sup)

JEAMMET, Philippe. Pour nos ados, soyons adultes. Paris (FRANCE) : Odile Jacob, 2010, 314 p. (Poches Odile Jacob)

FERRI, Tony. Le pouvoir de punir : Qu´est-ce qu´être frappé d´une peine ? Paris (FRANCE) : L´Harmattan, 2014, 135 p. (Logiques des pénalités contemporaines)

CICCONE, Albert, RESNIK, Salomon, KAES, René, et al. Psychanalyse du lien tyrannique. Paris (FRANCE) : Dunod, 2003, 192 p. (Inconscient et culture)

DARGÈRE, Christophe, BLANC, Alain. Vivre et travailler en institution spécialisée : La question de la prise en charge. Lyon (FRANCE) : Chronique Sociale, 2014, 240 p. (Comprendre la société)

BOWLBY, John. Volume 1 - L´attachement. Paris (FRANCE) : PUF (Presses Universitaires de France), 2013, 539 p. (Le fil rouge)

BOWLBY, John. Volume 2 - La séparation : Angoisse et colère. Paris (FRANCE) : PUF (Presses Universitaires de France), 2013, 557 p. (Le fil rouge)

BOWLBY, John. Volume 3 - La perte : Tristesse et dépression. Paris (FRANCE) : PUF (Presses Universitaires de France), 2012, 604 p. (Le fil rouge)

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